Il y a une grâce en toi qui ne se dit pas mais qui se sent, un parfum des aurores, une innocence préservée et précieusement chérie, comme un trésor d’enfant. C’est devant cette étincelle-là que je m’incline quand je te vois, devant cette chose si minuscule et si fragile qu’elle en devient invulnérable, inaltérable ; devant ce vibrant éclat de joie pure, de joie simple, qui danse entre les gouttes du désenchantement comme l’un de ces papillons que tu aimes tant. Si l’enfant prie, c’est en dansant.

Seigneur, je me suis aujourd’hui rendu dans ta demeure. Sur le chemin de l’Eglise, il y avait des myosotis en fleurs – et ton sourire caché derrière leur bleu lapis, tapi sous leurs âmes Sœurs. Tu es partout où l’on ne t’attend pas : c’est un peu de cette espièglerie, je crois, qui fait glousser les pivoines et sourire les roseaux. Le monde est un cadeau dans lequel Tu es partout caché, comme un secret d’enfant mal gardé qui brille dans l’œil de la vie et s’enfuit en riant. Tu es en moi, je suis en joie – tout le reste s’en est allé, s’est évanoui. Je ne suis habité que par Toi.

Les rares certitudes qu’il me reste sont faites de tout petits riens, des zestes d’une vérité simple et fragile qui n’a pas appris le mensonge. Que la prière d’un bougainvilliers en fleurs vaut tous nos monastères et tous nos dévots. Qu’avec un brin de science on peut tout expliquer de la vie sans jamais ne rien y comprendre. Que ton sourire est l’une de ces rares choses qui m’ait été donnée comme ça, par amour. Pas d’équation ou de calcul dans cette risette-là.

« Sans toi », ça n’existe pas. Tout est fait de ton regard bleu ciel, de ta frimousse-soleil et de tes cils en mistral. Plus de nuits, d’ennemis ou de proies – rien que toi, tout de toi, et de la lumière en cascade sur tes lèvres d’opale.

Notre mère nous donne le sein, nous berce gentiment pour pour tout effacer de ce cauchemar quotidien que l’on s’était bâtis. C’est en chemin.

L’entends-tu, au loin, l’écho simple de nos voies lactées ?

Patience : c’est en chemin. Toutes voiles sorties pour nous laisser porter par son souffle, nous arriverons bientôt et alors, à l’horizon, il n’y aura plus que toi. Plus de retour en arrière, de brouhaha, de chaos – juste toi, baignée de silence et de coquelicots.
C’est en chemin.

Tout ce que je sais de la vie est contenu dans le nid de ta pupille : autour, le ciel clairsemé de ton iris accueille déjà les hirondelles des soirs d’été. Avec elles, tout le reste s’est envolé – tout sinon cette joie des premiers enchantements.

Ta naissance, c’est un balbutiement du Seigneur, quelques flocons de son souffle et de sa voix.

Le silence est ton berceau, le murmure ton placenta.
Rien ne saura jamais t’en soustraire.