Notes à moi-même – 10

"Le besoin d'être vu, d'être entendu, d'être considéré, ce besoin-là se corrobore à mon besoin d'exister. C'est par le regard des autres que je me sais vivre et que je me sens aimé."

Ce matin, c’est venu comme une fulgurance : ma dépendance affective ne m’a jamais vraiment quittée.

En attendant le bus, mon cœur se serre en voyant que je n’ai pas de nouveau message de toi, ni de personne d’autre d’ailleurs ; qu’en cet instant précis personne ne semble s’intéresser à moi. La blessure d’abandon est encore bien présente, elle refait parfois surface.

Je dis à tous que j’aime la solitude, que je la cultive pour prendre soin de mon espace, mais en réalité je ne suis jamais seul plus de quelques heures. Chez moi, je suis relié aux autres et au monde par l’intermédiaire de mon ordinateur. Ailleurs, mon téléphone ne me quitte pas – sauf lorsque je suis entouré, accompagné d’amis à travers lesquels je me sens aimé. Et lorsque je ne me sens plus aimé, lorsque je me retrouve face au gouffre qui vit en moi, lorsque les autres deviennent des miroirs de ce néant, de ce béant, je fais de mon téléphone l’extension de ma main, et l’extension de mon cœur à travers elle.

Le besoin d’être vu, d’être entendu, d’être considéré, ce besoin-là se corrobore à mon besoin d’exister. C’est par le regard des autres que je me sais vivre et que je me sens aimé.

J’aime parfois me parer de grands principes universels, me vêtir de sagesse et d’éclat. Je prétends souvent de mon âme qu’elle est ancestrale, et de mon esprit qu’il est calme et mesuré. Mais à la vérité, une partie de mon cœur a entre 3 et 8 ans – elle joue à la marelle, bondissant d’un âge à l’autre comme un jeu douloureux et délicieux, tous deux à la fois car l’un vient avec l’autre.

La guérison s’opère peu à peu, mais rien n’efface tout à fait la douleur de vivre. Exister est un déchirement permanent, une danse de stupeurs et de tremblements où s’alternent joies et peines, un curieux mélange de grâce et d’absence, de présence et de souffrance. Rien ne guérit totalement de ce déchirement-là.

Moi, j’alterne les moments de grandeur avec les moments à nu, pauvres et vulnérables, qui disent tout de la vie. C’est uniquement dans ces instants de dépouillement que la vie prend tout son sens, que le cœur est entier. Vivre pleinement, ce n’est pas nier sa souffrance mais l’accepter, lui prêter une main et un stylo, recueillir sur le papier ses appels et ses pleurs. Sans cet enfant intérieur, tantôt étincelant – plus jeune encore que tout ce que je sais du monde – et tantôt pluvieux, je ne sais pas me décliner.

Depuis mon enfance, j'aime écrire, dessiner, peindre et créer ; ma rencontre avec la poésie est, quant à elle, plus récente. Depuis, c'est une véritable partenaire de vie qui épouse une multiplicité de formes successives et se renouvelle sans cesse : tantôt exutoire ou partenaire d'expression, vectrice de mes odes à la joie et compagne de mes aspirations, la poésie sait m'écouter. Et si ces quelques mots n'ont pas suffi à satisfaire votre curiosité, c'est par ici que ça se passe !

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